30 Mars 2020

[COVID-19] Chute de la pollution en Europe avec le confinement

Des satellites européens observent la chute de la pollution atmosphérique au-dessus de la France, de l'Italie et de l'Espagne. Ces 1eres cartographies sur l’Europe depuis le confinement sont analysées de manière approfondie par les scientifiques. Elles seront complétées par d’autres études dans les semaines à venir.

POLLUTION AU DIOXYDE D'azote PAR Sentinel-5P

Le constat est sans appel. Depuis la mise en place des mesures de confinement face à la pandémie de COVID-19, la pollution au dioxyde d’azote a chuté drastiquement comme le montrent ces cartographies sur l’Europe, publiées le 27/03/2020, par l’Agence spatiale européenne (ESA).

Concentrations en dioxyde d’azote au-dessus de la France. Crédits : contains modified Copernicus Sentinel data (2019-20), processed by KNMI/ESA

Lancé en octobre 2017, le satellite Sentinel-5P du programme européen Copernicus délivre chaque jour une cartographie planétaire de polluants atmosphériques depuis une orbite à 800 km altitude. La comparaison des concentrations en dioxyde d’azote (NO2) sur la période du 14 au 25 mars 2020 à la moyenne de mars 2019 atteste d’une diminution d’au moins 30 % au-dessus de Paris, Madrid et Milan. Sentinel-5P avait déjà révélé une chute spectaculaire en Chine. Polluant touchant les poumons, le dioxyde d’azote est émis par le trafic routier et les activités industrielles. Le confinement a mis un frein à ces émissions. Comme le souligne Carole Deniel, responsable des programmes Atmosphère et Climat au CNES : 

Ces images sont frappantes car elles illustrent à quel point les activités humaines ont un impact sur la qualité de l’air que nous respirons

Les données de Sentinel-5P sont actuellement analysées de manière plus approfondie par des chercheurs du monde entier afin de quantifier précisément l'impact du confinement sur la pollution au dioxyde d'azote. « Calculer des évolutions de concentration et estimer les émissions de polluants correspondantes au niveau d'une zone bien précise nécessitent de prendre en compte les conditions météorologiques (impact des nuages, périodes anticycloniques avec stagnation des vents, etc. ), la chimie de l'atmosphère (durée de vie du dioxyde d'azote, réaction avec les autres gaz) en utilisant des données récoltées sur le terrain, par d’autres satellites et des modèles de chimie-transport de l’atmosphère. Ces études reposent sur des approches de modélisation inverse. Elles vont prendre du temps » indique Gaëlle Dufour qui travaille sur les données de Sentinel-5P au sein du LISA (le Laboratoire Interuniversitaire des Systèmes Atmosphériques, UMR du CNRS, à Créteil)

A chaque passage, Sentinel-5P mesure la concentration en polluants atmosphériques sur une largeur de bande au sol de 2 600 km avec une résolution de 7 km x 3,5 km. Crédits : ESA/ATG medialab.

 

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Concentrations en dioxyde d'azote au-dessus de l'Espagne. Crédits : contains modified Copernicus Sentinel data (2019-20), processed by KNMI/ESA.

 

Carole Deniel, responsable des programmes Atmosphère et Climat au CNES. Crédits : CNES/PIRAUD H., 2013.

pollution au monoxyde de carbone par IASI 

D’autres satellites européens ont observé une baisse de la pollution atmosphérique avec les 1eres mesures de confinement. Les satellites météorologiques Metop grâce à leur instrument IASI se sont penchés sur le monoxyde de carbone, un polluant atmosphérique émis par toutes les activités qui font intervenir la combustion : le trafic routier, les industries et le chauffage. 

Dans la région de Milan, IASI a observé une baisse de l'ordre de 20 à 30 % de la pollution au monoxyde de carbone

Nous sommes en train de travailler sur des cartes pour la France et le reste de l'Europe mais comme le monoxyde de carbone persiste plusieurs semaines dans l'atmosphère (contre quelques heures en été et 1-2 jours en hiver pour le NO2, NDLR), et que la pollution en France est loin d'être celle de la Chine ou du Nord de l'Italie, il faut attendre un peu pour évaluer l'impact du confinement » indique Cathy Clerbaux, chercheuse au LATMOS (le Laboratoire Atmosphères, Milieux, Observations Spatiales, UMR du CNRS, à Guyancourt et Paris) qui commente ces résultats dans un audio du CNRS. Sur la Chine, IASI avait observé une diminution de la concentration de monoxyde de carbone de 10 à 45 % dans toute la région entre Wuhan et Pékin suite aux mesures de confinement de la population.

Concentrations en monoxyde de carbone (CO) au-dessus de l’Italie mesurées par l’instrument IASI. Crédits : LATMOS/IPSL-ULB.

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L’Agence spatiale européenne (ESA) opère actuellement 7 satellites du programme Copernicus de l’Union européenne. Ces satellites sont des sentinelles de l’état de notre planète. Lors de la réunion au niveau ministériel du Conseil de l’ESA à Séville, fin novembre 2019, les ministres des États membres se sont engagés sur 1,8 milliard d'euros afin de développer de nouveaux satellites Sentinel. Pour l’Europe, l’observation de notre Terre et l’étude du climat sont des priorités absolues. La France est le 2e contributeur au budget de l’ESA, à hauteur de 18,5 %.